Le français J.M.G. Le Clézio décroche le Prix Nobel de littérature

Actualité en France n° 42, octobre 2008

JPEG Le Prix Nobel de littérature 2008 a été attribué à l’écrivain français Jean-Marie Gustave Le Clézio pour son œuvre, inspirée par les thèmes du voyage, de l’exil et de la nostalgie des mondes premiers. Troisième Nobel français en quatre jours décerné par l’Académie suédoise, J.M.G. Le Clézio, qui vit sur plusieurs continents, est l’un des maîtres de la littérature francophone contemporaine, l’un des auteurs les plus lus et les plus traduits dans le monde. Son œuvre très diverse évoque les différentes cultures, notamment l’Amérique latine, l’Océanie et l’Afrique.

L’Académie a expliqué avoir voulu récompenser un « écrivain de la rupture, de l’aventure poétique et de l’extase sensuelle, l’explorateur d’une humanité au-delà et en dessous de la civilisation régnante » Cet écrivain secret, discret, intègre, d’une très grande élégance, menant une constante recherche sur l’écriture, est l’auteur d’une cinquantaine d’ouvrages portés par une grande humanité (romans, essais, contes, nouvelles, traductions de mythologie indienne) parmi lesquels Désert, Le chercheur d’or, Le poisson d’or, La fièvre, Le déluge. Jean-Marie Gustave Le Clézio, qui vient de publier Ritournelle de la faim, un de ses livres les plus attachants, a reçu, entre autres, le prix Renaudot en 1963 pour son livre Le procès-verbal. Il était alors âgé de 23 ans. Le ton, le style, le contenu impressionnent.

Sa première partie d’écriture, tournée vers les thèmes de la folie et du langage, témoigne d’un esprit novateur et révolté. Une deuxième période se dessine au début des années 80, orientée vers des préoccupations plus spirituelles et humanistes.

Depuis ses débuts, J.M.G. Le Clézio attribue à la littérature un grand niveau d’exigence : « L’écriture est la forme parfaite du temps », écrit-il dans l’un de ses essais L’Extase matérielle, paru en 1967. Dans ce traité, il résumait ainsi sa philosophie existentielle : « La beauté de la vie, l’énergie de la vie ne sont pas de l’esprit, mais de la matière. »

Agé de 68 ans, Le Clézio est né en 1940, à Nice, de parents issus d’une vieille famille de Bretons immigrés au XVIIIème siècle à l’Ile Maurice (Océan indien), colonisée par les Britanniques. Son père exerce le métier de médecin au Nigeria où l’écrivain a passé une partie de sa jeunesse. Le Clézio poursuit des études au collège littéraire universitaire de Nice, puis après quelques années passées à Londres et à Bristol, il devient enseignant aux Etats-Unis.

L’ensemble des œuvres de Jean-Marie Gustave Le Clézio se nourrit de la diversité de ses origines et de ses nombreux voyages. On l’appelle “l’écrivain nomade”, “un indien dans la ville” : surnoms justifiés parce que ce grand amoureux de la nature s’est créé un univers cosmopolite. « Ecrire, ce n’est pas seulement être sur sa table et se livrer à soi-même, c’est aussi écouter ce bruit du monde » a-t-il estimé lors d’une conférence de presse organisée à Paris au siège de son éditeur Gallimard. « Mon message est très clair, c’est qu’il faut continuer à lire des romans en ces temps de crise mondiale parce que je crois que le roman est un très bon moyen d’interroger le monde réel ».

Le Clézio démontre, livre après livre, que l’être humain n’est pas linéaire, qu’il se découvre tout au long de sa vie et qu’il évolue au gré des situations. Il a, pendant quatre ans, de 1970 à 1974, partagé la vie des Indiens Emberas et Waunanas au Panama, une expérience de dénuement qui aura beaucoup d’influence sur son œuvre. « Cette expérience », dira-t-il dans son bel essai sur le rituel amérindien La Fête chantée, « a changé toute ma vie, mes idées sur le monde et sur l’art, ma façon d’être avec les autres, de marcher, de manger, d’aimer, de dormir et jusqu’à mes rêves. »

En 1975, Le Clézio épouse en secondes noces, Jémia, originaire du Sud marocain. Père de deux filles, il vit à Albuquerque dans l’Ouest des Etats-Unis, où il a longtemps enseigné la littérature, mais vient souvent à Nice et dans sa maison bretonne de la baie de Douarnenez.

Le Nobel couronne ainsi une œuvre d’une grande ampleur de vue et de style, aux accents universels. L’une des écritures les plus exigeantes et les plus inventives.

J.M.G. Le Clézio recevra, le 10 décembre à Stockholm, la somme de dix millions de couronnes suédoises (1,02 million d’euros). Il s’est déclaré « très ému et très touché » par la récompense lors d’un entretien accordé à la radio publique suédoise. Il est le quatorzième Français à recevoir ce prix et s’inscrit dans la prestigieuse liste qui comprend Albert Camus, François Mauriac, Henri Bergson ou André Gide.

Après l’annonce de l’attribution du Prix Nobel à Jean-Marie Gustave Le Clézio, le président de la République française a salué un « citoyen du monde, fils de tous les continents et de toutes les cultures. (…) Grand voyageur, il incarne le rayonnement de la France, de sa culture et de ses valeurs dans un monde globalisé où il porte haut les mots de la francophonie ».
Le Ministre français des Affaires étrangères et européennes, M. Bernard Kouchner, a également tenu à saluer l’événement : « En distinguant Jean-Marie Gustave Le Clézio, le jury du prix Nobel rend hommage à un auteur qui, depuis Le Procès-Verbal, a su construire une œuvre aux accents universels. A travers lui, les plus lumineuses valeurs humanistes sont célébrées, celles-là même que la France promeut au sein de la communauté internationale : refus de l’injustice et de l’oppression, tolérance, respect des libertés individuelles et des droits des minorités, rôle essentiel de la culture, épanouissement de l’individu…Aujourd’hui, en la personne de Jean-Marie G. Le Clezio et grâce à lui, toute la littérature française contemporaine se trouve honorée. »
Annik Bianchini

Dernière modification : 16/10/2008

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